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Les tribulations d'une monoparent'aise
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Les tribulations d'une monoparent'aise
1 août 2010

Lettre à mon père

Lettre écrite en février 2006. Papa Voici 3 ans que je suis une thérapie. Qu’avais-je sur le cœur, d’aussi lourd, pour que j’aille, chaque semaine, me confier à un psy ? Pourquoi le passé pesait si lourd que j’avais peur du présent et n’arrivais pas à envisager l’avenir ? Je suis arrivée chez le psy, au bout du rouleau, prête à mettre fin à ma vie et à celle de mes enfants. Maintenant, grâce à mon travail psycho, guidée par le psy, je revis. Ou devrais-je dire, plutôt, je vis. Cette année a marqué le tournant, radical, de ma vie. J’ai enfin compris et digéré le passé. J’ai mis des mots sur mes souffrances. J’ai été victime de maltraitances physiques et morales. Et tu en es le principal responsable. J’ai enfin compris que ce n’était pas moi la coupable. Ma vie a basculé quand j’avais 6/7 ans, à la mort de mon grand père, ton père. D’une famille « normale », nous avons basculé dans une vie où la violence est devenue notre quotidien, de manière crescendo. Avant, j’ai des souvenirs de fêtes familiales et de vacances en famille, des moments de tendresse. Je me souviens de Noëls avec mes cousins, ma famille. Je me souviens des goûter-dîner que nous faisions, tous les 4, le dimanche soir, sur votre lit. Je me souviens des câlins qu’on faisait. Je me souviens de tous ces moments qui ont fait que j’étais une petite fille, heureuse, pleine de vie, rigolote. Puis, il y a eu ce cri. Ce cri qui résonne encore dans ma tête. Ce cri qui me réveille encore : « Appelez Police secours ! A l’aide ». Mon frère et moi étions en train de jouer dans ma chambre. J’ai entendu ce cri, poussé par ta mère, dans le hall de l’immeuble. Maman est venue nous chercher et nous a conduits, sans un mot, chez la voisine. Elle lui a juste dit : « ça y est ! C’est arrivé ! C’est grave. Prends soin des enfants. » Et Maman est partie. J’ai cru qu’il t’était arrivé quelque chose. Mais je n’ai pas osé parler. Je me souviens ensuite, quand BM et GP (mes grands parents maternels) sont venus nous chercher. Mon frère était malade. L’ambiance était étrange, irréelle. Je me souviens de BM m’annonçant la mort de mon grand père (paternel). Je ressens encore ma première souffrance. Je découvrais la mort, la perte d’un être que j’Aimais. J’aimais (et j’aime encore) mon grand père. Il était si présent pour moi. Et ensuite ma vie a basculé. J’avais 7 ans. Mes premiers souvenirs de tes actes violents. Lors des fêtes, tu étais ivre et que tu cognais. Petit à petit, les gens, la famille, ont arrêté de nous inviter. Je me souviens quand tu frappais Maman. Je me souviens de tes anniversaires où on t’attendait et que Maman finissait par aller te chercher au commissariat car tu étais encore ivre. Je me souviens d’une soirée où tu avais encore beaucoup bu. Dans la voiture, sur le retour, avec Maman, vous vous êtes encore disputés et tu l’as jeté de la voiture. Tous ces actes de violence, je les voyais, j’y assistais, mais à l’époque, je ne les subissais pas. Puis la situation s’est dégradée. Nous arrivions en Bretagne. Déjà, j’en souffrais car j’étais arrachée à mon univers, mes amis et surtout BM. A cette époque, tu as commencé à être violent avec moi. Je me souviens de ta première maltraitance. Nous étions au Guildo. Un dimanche, mon frère et moi avions pris 5 Fr., dans ta poche de pantalon et avions acheté des bonbons. Quand nous sommes rentrés, tu nous attendais, ta ceinture à la main. Maman était derrière toi. Maintenant, avec le recul, je sais que c’est la peur que j’aie vu dans ses yeux. Tu nous as attrapés et fouettés. Je sens encore les coups pleuvoir, la brûlure à chaque coup de ceinture. Ensuite, tu nous as enfermés dans la voiture. A ce moment, je n’ai pas compris. J’étais une enfant. Nous avions fait une bêtise. Tu nous as punis. J’ai cru que c’était normal. Mais, en réalité, nous venions de franchir un nouveau cap dans la violence. Et puis, les souvenirs douloureux se succèdent. En 6ème, j’ai imité ta signature, suite à un 3 en math. J’en ai parlé à Maman. J’espérais qu’elle allait signer mon carnet et ne t’en parlerait pas. Car, déjà à cette époque, je savais que cela allait me coûter cher. Elle n’a rien fait. Elle m’a dit que je verrais ça avec toi quand tu rentrerais. Pourquoi a-t-elle fait ça ? Pourquoi ne m’a-t-elle pas protégée ? Elle aussi savait ce qui allait m’arriver. Cette question fait partie des nombreuses questions que j’aurai aimé lui poser, maintenant, mais qui resteront toujours sans réponse. Et puis tu es rentré. Nous étions dans la cuisine. Maman à l’évier et moi en train de vider le lave vaisselle. Tu es entré dans la pièce. Tu as lu mon carnet. Tu m’as regardé avec ce regard haineux que j’ai vu tant de fois après. Tu m’as attrapé, encastré dans le lave vaisselle. Et là encore, les coups pleuvaient. J’entends encore le cri de Maman : « arrête tu vas la tuer ». Je ressens encore la douleur si forte, si diffuse que je ne sentais même plus les coups. Je me souviens, qu’ensuite, j’étais accroupie, terrée dans l’encadrure de la porte. Tu me hurlais dessus, j’étais ta honte, j’étais une moins que rien, …. Il me semble que c’est la première fois que j’ai entendu cette phrase. Cette phrase que tu n’as pas cessé de me dire pendant toutes ces années de maltraitance : « Moi, je n’ai pas à rougir de ma vie. Je peux me regarder, tous les matins, dans la glace, sans avoir à rougir ». Quelle ironie ! A cette même période, j’ai vu où tu passais tes soirées. Quand tu rentrais tard, Maman nous disait que tu travaillais. En réalité, tu passais tes soirées au bar. Ce café, j’y ai passé des soirées, à t’attendre. Tu devais me ramener à la maison mais tu t’y arrêtais et buvais avec tes copains. Je me souviens que je faisais mes devoirs sur la table, près de la porte qui menait au resto, en attendant, en espérant que tu me ramènes à la maison. As-tu vu que tes copains, derrière ton dos, me caressaient les cuisses, me touchaient, me tripotaient ? J’étais en 6ème. J’avais 10/11 ans. Ils me dégouttaient, je me dégouttais. Je me souviens de nuits que j’ai passées dans ta voiture à t’attendre (après avoir bien bu au café, vous décidiez d’aller en boîte), pendant que tu t’éclatais et que tu te battais. J’attendais avec la peur que tu me frappes encore ou qu’un de tes copains vienne encore me toucher. Je me souviens de mes premières hontes d’arriver à l’école, la gueule défoncée. Je me souviens des regards des adultes qui voyaient bien que quelque chose n’allait pas mais qui préféraient fermer les yeux, pour ne pas déranger leurs petites vies tranquilles. A cette époque, je commençais à être très grosse, trop grosse. Je me forgeais cette carapace que je n’allais plus quitter, jusqu’à aujourd’hui. Je m’enfermais dans un monde imaginaire pour me protéger du monde réel. Et puis, j’ai grandi. Tu étais de plus en plus violent. Tu m’as craché la vérité concernant l’alcoolisme de Maman. Même sans raison, tu me frappais. Les dîners étaient un cauchemar. Vous buviez. Tu nous envoyais chercher ton rouge. Tes paroles étaient humiliantes. Nous n’étions que des bons à rien. Tu me disais, tout le temps, « tais toi tu n’as rien d’intéressant à dire ». Et la fin du dîner marquait, souvent, le début des coups. Si j’avais la chance que tu me laisses aller dormir, je savais que, dans les minutes qui suivaient, on allait t’entendre hurler sur Maman. On allait t’entendre la frapper. Des fois, on intervenait. J’essayais de m’interposer mais cela ne faisait qu’empirer les choses. Tu t’adonnais alors à une séance d’humiliations collectives. Quand je ne descendais pas, j’attendais terrifiée, que tu montes, en priant pour que ça soit pour te coucher. Quand tu montais l’escalier, je savais, dès la première marche, si c’était pour te coucher ou pour me faire du mal. Je me souviens des fois où tu entrais dans ma chambre, en furie. Tu m’arrachais de mon lit en me tirant par les cheveux. Ensuite, j’avais droit aux coups et aux humiliations, avec toujours les mêmes phrases : « tu es ma honte, tu n’es qu’une bonne à rien. Moi, je n’ai pas à rougir de ma vie. Je peux me regarder, tous les matins, dans ma glace, sans avoir à rougir ». Je me souviens de la fois où tu as chassé une amie qui avait eu le courage de venir dormir à la maison. Le soir, après que tu aies bu, tu nous as coursées, dans la rue, avec la cravache. Nous étions en pyjama. Nous te fuyions. Je la revois, dans la cuisine, en pleurs, terrorisée, au téléphone avec ses parents, les suppliant de venir la chercher. Ensuite, tu as inventé un nouveau jeu. Tu me forçais à me mettre à genoux, devant toi, pour te lire un livre. Je ne voulais pas. Je suppliais Maman de m’aider. Je me souviens, d’une fois, où j’ai cédé. Je suis tombée à genoux. Et après c’est le trou noir. A cette époque, tu as, également, étendu tes insultes. En plus d’être une bonne à rien, j’étais, pour toi, qu’une pute. Tu n’as pas apprécié du tout quand je t’ai répondu « non pas une pute mais une salope, je ne fais pas encore payer ». Tu es entré dans une rage folle. Les coups ont été encore plus violents. Mais pour moi, ce fût le moment où j’ai vraiment pris conscience que j’étais en danger et qu’il fallait que ça cesse. Ce qui se passait à la maison n’était pas normal. Il fallait que je fuie. Je rentrais en 2nde. J’ai choisi la pension. J’étais loin de la maison, pendant la semaine. Certes, j’avais peur de savoir mon frère et Maman, seuls avec toi. Quand je ne pouvais pas les joindre car le téléphone était coupé, je remontais, angoissée, dans ma chambre et je pleurais seule dans mon lit. Le vendredi soir, Maman venait me chercher. Rien qu’à sa tête, je mesurais l’ambiance à la maison. Je détestais les week ends. Et puis Maman est tombée gravement malade. J’étais en 1ère. J’avais 16 ans. Pendant son séjour, à l’hôpital, en réa, je l’ai remplacé. Je vivais l’enfer. J’aurai voulu être à sa place. Je ne dormais plus la nuit. Je dormais en cours. Tu as été convoqué chez le proviseur. Il te faisait des courbettes. Pourtant, lui aussi savait ce qui se passait à la maison. Peu de temps après que Maman soit rentrée de l’hôpital, j’ai été virée de l’internat et de la cantine, car ce n’était pas payé. Le midi, je ne mangeais pas. Rarement, Maman pouvait me donner 10 Fr. pour que je puisse m’acheter un sandwich. Régulièrement, mes copains m’apportaient du pain, un morceau de fromage. Comme j’avais honte, tu n’imagines pas. J’ai foiré mon année scolaire. Pour la première fois je redoublais une classe. Pendant ma seconde 1ère, aux vacances de Pâques, j’ai pu prendre un appart à Lamballe, grâce à BM et GP. Et là, j’ai découvert la liberté. Enfin, j’avais un pied en dehors de la maison. Je continuais à rentrer le week end. Mais, au moins la semaine, j’étais libre. Je ne subissais tes violences que le dimanche soir. D’ailleurs, je n’ai jamais compris pourquoi tu ne me frappais pas devant mon frère, à cette époque là. A la veille de mon entrée en terminal, tu m’as ordonné d’arrêter l’école et d’aller travailler, pour te ramener un salaire (déjà à cette époque, tu ne travaillais plus, tu vivais aux dépends des autres). J’ai refusé. Tu m’as foutu dehors. Merci ! C’était le plus beau cadeau que tu pouvais me faire. Enfin, j’avais les 2 pieds dehors. J’étais libre. J’avais mon travail. J’allais à l’école. Je revenais de moins en moins souvent à la maison. Maman venait se réfugier chez moi quand tu étais trop violent. Je n’oublierai jamais la fois où elle est arrivée le corps noir, couverte de bleus. Certes, j’ai raté mon bac. Certes, j’ai fais ma première tentative de suicide (tu n’en as jamais rien su). Mais enfin, j’étais libérée de ta violence. Enfin, je le croyais. A 19 ans, je me suis retrouvée obligée d’aller chez ma tante, ta sœur. Et là, l’enfer a repris. J’étais ta fille. Elle me l’a fait payer très cher. J’étais sa bonne. Elle me retraçait sans cesse tes erreurs. Et toi de ton côté, tu me reprochais, avec violence, d’avoir atterri chez elle. Je vous ai servi de balle dans votre match, dans votre guerre. Là, j’ai fait ma deuxième tentative de suicide. Personne ne m’a demandé pourquoi. Personne sauf BM, comme d’habitude. Mais ta sœur faisait tout pour que je ne puisse pas la voir. Enfin, j’ai sauté sur la première occasion pour partir de cet enfer. Je me suis mise en ménage avec mon petit ami. Soit, je n’étais pas heureuse avec lui mais enfin, grâce à sa famille, j’ai connu un peu d’équilibre, d’harmonie. De plus en plus, je t’ai exclu de ma vie. Je me suis construite. J’ai eu mon BTS. J’ai quitté mon petit ami. Je suis allée vivre chez BM et GP. Certes les choses n’étaient pas toujours faciles, dû à notre grande différence d’âge. Mais, enfin, j’étais dans un environnement sain, équilibré et avec plein d’amour. Puis, ils sont partis vous rejoindre en Normandie. BM se faisait une telle joie d’habiter près de sa fille. A quoi cela a-t-il servi ? A rien, sauf à les faire souffrir, car ils prenaient conscience de ce qui se passait en réalité à la maison. Eux qui espéraient vous voir plus souvent. Ils voyaient Maman uniquement quand vous aviez besoin d’argent. Et je sais qu’à ce niveau, vous avez largement vécu aux crochets des grands parents. Pendant ce temps, j’habitais au pavillon à Rosny. Je continuais mes études en Sup de Co. Je travaillais. J’avais des amis, je sortais. J’étais libre. J’ai eu mon diplôme. Enfin !! J’avais réussi. Un bac + 5 en poche, et ce grâce à moi. Je pouvais enfin te prouver que je n’étais pas une bonne à rien. J’étais la plus diplômée de la famille. Puis, BM et GP sont rentrés sur Rosny. Ils étaient si déçus, par vous, par Maman. Je me souviens de la souffrance que j’ai lue dans leurs yeux. Eux qui aimaient tant Maman ont vu votre déchéance. En mai 96, je suis allée habiter dans le studio de BM et GP. Nos rythmes de vie différents, les problèmes familiaux, … ont fait que la cohabitation était devenue très difficile. Entre temps, mon frère était venu habiter chez eux. Et puis, en juillet, le 26, à 7h du mat’, tu m’as appelé pour m’annoncer la mort de Maman. J’ai appelé ta sœur et son frère, pour leur annoncer. Ils ont fait preuve d’une grande indifférence. Pour moi, ce jour là, ils sont morts. Et puis je suis allée chez BM. Je revois BM et mon frère. Ça fait mal. BM s’est effondrée sur son lit. Mon frère sur le fauteuil. Nous avons pleuré en silence. Et puis, j’ai pris la route pour te rejoindre. Lorsque nous étions tous les 2, dans votre cuisine, en train de nettoyer le sang de Maman, tu m’as dit qu’enfin tu allais pouvoir refaire ta vie. Comment as-tu osé me dire cela ? Maman, à peine froide, tu envisageais déjà de la remplacer. Pourquoi ne l’as-tu pas fait avant ? Un an et demi après, je venais juste de me marier, tu es venu vivre à la maison. Tu t’es installé. Je t’ai logé, nourri, blanchi. Et l’ironie du sort a voulu que tu arrives pile 10 ans après m’avoir foutue à la porte de chez toi !!! Tu assistais à mes problèmes de couple. Tu voyais, à longueur de temps, les dérapages de mon mari. Mais, jamais, tu n’es allé le voir pour lui dire franchement qu’il déconnait. Par derrière, tu ne pouvais pas le sentir et par devant, tu ne disais rien. Tu me voyais souffrir et tu ne m’as pas aidé. Régulièrement, je me confiais à toi. Ne crois tu pas que j’espérais que tu interviennes. Tu étais mon père. J’espérais que tu essayes de me défendre, de me protéger contre mon mari. Mais tu ne faisais rien. Et pourtant, tu étais constamment à la maison. Tu ne cherchais toujours pas de travail (pourquoi faire, m’avais tu dit, tu étais logé gratis et tu touchais ton rmi qui te suffisait pour ton argent de poche !). A cette époque, j’avais encore peur de toi. Ta présence me rappelait, sans cesse, le passé et mes souffrances. Je t’en voulais et pourtant, je me sentais obligée (moralement) de t’aider. A ton avis, comment l’ai-je vécu ? Je me souviens d’une fois, en janvier, après les fêtes de Noël (que j’avais payé). Je t’ai demandé de participer aux factures. Ta réponse a été des plus choquantes : « je ne suis pas là pour payer vos extravagances financières ». Comment pouvais-tu dire cela alors que ça faisait quatre mois que je t’hébergeais à l’œil. N’était-il pas normal que tu participes aux dépenses de chauffage, de nourriture, … ? Après plusieurs violentes disputes, j’ai fini par te demander de partir, de rentrer chez toi. Je ne comprends déjà pas pourquoi il a fallu que je te demande de partir. Cela aurait du venir de toi, non ? Tu assistais à l’échec de mon couple. Ne pouvais-tu pas comprendre, seul, que ce n’était surement pas avec des squatteurs à la maison que nous pouvions créer, avec mon mari, l’intimité de notre famille. Remarque, de toute façon, c’était déjà trop tard. Après la naissance de notre fille, sans m’en rendre compte, je faisais une dépression Post Partum. Le passé me sautait à la figure, le présent me terrifiait. Serais-je capable d’élever mon enfant, alors que pendant des années, tu m’as répété que j’étais une bonne à rien ? Serais-je capable de protéger mes enfants, de les éduquer, de les aimer. Je me raccrochais à ce petit être que j’avais mis au monde. Un jour, j’étais avec ma fille dans mon lit. Je lui ai juré (avec mes trippes) de tout faire pour la protéger afin qu’elle ne vive jamais les souffrances que j’avais connu. Et pourtant, les choses commençaient mal. Mon mari ne me tapait pas, soit. Mais, avec lui, j’ai revécu l’enfer de la maltraitance morale. J’étais au plus bas et il en rajoutait en m’humiliant. Pour lui aussi, je n’étais qu’une bonne à rien. Il n’a pas eu de mal à me le faire croire, tu avais déjà bien préparé le terrain. Heureusement, BM était là, comme toujours, pour m’aider à garder la tête hors de l’eau et pour me guider. Un jour, j’ai compris que j’étais sur la même route que Maman. J’étais à un croisement de ma vie. Soit, je suivais le même chemin que Maman. Je savais que cela me conduirait à la mort. Soit je prenais mes enfants sous le bras et je quittais mon mari. C’est le chemin que j’ai choisi et je ne le regrette pas. Au contraire. C’est à ce moment là, je pense, que j’ai commencé à pouvoir réapprendre à vivre. En effet, pendant toutes ces années de galère, je n’avais pas conscience de ma force. Je pensais que je n’étais qu’une minable. Pourtant, BM ne cessait de me dire le contraire. Je ne la croyais pas. Et puis, petit à petit, j’ai découvert que je n’étais pas si nulle. Certes, les choses n’étaient pas faciles. J’ai continué ma descente dépressive. Il y a eu un big clash, … Mais le processus interne de réhabilitation personnelle était lancé. Et puis, j’ai atterri chez mon psy. Et les choses ont vraiment changé. J’ai enfin pris conscience que je n’étais pas un défaut à part entière, comme vous me l’avez fait croire. Je suis comme tout le monde, j’ai des défauts mais aussi des qualités. Petit à petit, j’ai pris conscience de ma valeur. Des gens ont cru en moi, m’ont soutenu. Je me suis fait une vie, avec des amis, ma famille (mes 2 enfants et BM). Le chemin, pour en arriver là, a été long et douloureux. Il m’a fallu beaucoup de courage et de force pour oser et réussir à affronter mon passé. Comme je disais à mon psy, j’avais le sentiment d’avoir un gros sac de merde sur les épaules. Il était une entrave à ma vie. Il pesait très lourd. Je n’avais pas la force et j’avais peur de l’ouvrir car je savais qu’à l’intérieur, il n’y avait que souffrances, douleurs, malheurs et autres merdes. Il a fallu, tout d’abord, que je me reconstruise, que je retrouve mes forces pour enfin être capable de l’ouvrir et d’y faire face. Combien de fois ai-je voulu abandonner car cela faisait trop mal. Le choc a été très violent, crois moi. Mais, j’ai trouvé la force de continuer, pour mes enfants. Je sais qu’ils ne peuvent que compter sur moi pour les protéger, pour les faire grandir. Avant même qu’ils ne soient capables de le dire, je voyais, dans leurs yeux, la confiance qu’ils m’accordaient. Et je m’étais juré de ne jamais la trahir. Et puis, il y avait encore et toujours BM. Elle était et est toujours mon pilier. Avec elle, j’ai pu aborder le passé. Ce n’était pas un sujet tabou, entre nous (contrairement à toi, qui ne reconnais même pas ce qui s’est passé). Souvent, elle me disait qu’elle espérait que Dieu lui donnerait la force de vivre jusqu’à ce que je sois tirée d’affaire. C’est ce qui s’est passé. Elle est morte juste après que je lui ai dit (et qu’elle est sentie) que je commençais vraiment à voir le bout du tunnel, que je commençais enfin à vivre Ma Vie. J’étais en train de renaître. Je découvrais enfin la personne que j’étais. Je digérais le passé. Cela me permettait d’affronter le présent et de croire en l’avenir. D’ailleurs, depuis sa mort, je vois bien que ce n’est pas ma famille de sang qui me permet d’affronter les épreuves que je traverse. C’est grâce à moi et au soutien de mes Amis, de mon Entourage, de ma Famille de Cœur. Quand BM est morte, ce n’est pas toi, ou mon mari, ou mon frère qui êtes venu m’aider à affronter mon chagrin. Et pourtant, vous étiez les mieux placés pour savoir que sa mort était l’épreuve que je redoutais le plus. Ce sont mes amis qui m’ont consolé, qui m’ont aidé à ne pas m’effondrer. Et ce sont encore eux qui m’ont encouragé à continuer à vivre. Je venais de perdre mon pilier. Et ils étaient là pour m’aider à prendre conscience que je pouvais vivre, même sans, car j’en étais capable. Maintenant, je sais que je suis sur la bonne route. Encore en phase de guérison, je dois t’affronter. Je t’écris cette lettre, sans haine et violence, pour enfin tirer un trait sur le passé. J’espère que cela pourra nous permettre d’ouvrir un dialogue constructif. Si cela n’est pas le cas, alors tant pis. Je sais que j’ai raison de le faire pour moi, si je veux me créer un avenir serein. Dans l’espoir de lire ta réponse Ta fille
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